Mélancolie
VIII | VIII |
nil ‘amaniana aviarta in tus ojus abagan lus animalis qui ti quimaran adientru dil sueniu/nunca dizin nada/ mi dexan sinizas/y solu cun il sol/ |
en la mañana abierta lentamente por tus ojos pasan los animales que te quemaron adentro del sueño/nunca dien nada/ me dejan cenizas/y solo con el sol/ |
VIII | VIII |
am offenen Morgen ziehen langsam durch deine Augen die Tiere die dich verbrannten mitten im Traum/nie sagen sie etwas/ lassen mir Asche zurück/und mich allein mit der Sonne/ |
dans le matin ouvert lentement passent par tes yeux les animaux qui t’ont brûlé dedans le rêve/jamais ils ne disent rien/ me laissent des cendres/ et seul avec le soleil/ |
Je voulais d’abord n’accompagner cette photo que de ce poème en judéo-espagnol du grand auteur Juan Gelman et de ses traductions; la première en espagnol par l’auteur lui-même, la deuxième excellente en allemand (langue dans laquelle j’ai découvert ces poèmes) par Tobias Burghardt, et la dernière en français par Jean Portante. Voici tout de même un petit texte qui explique d’où vient mon association image-mots.
J’aime la photographie, car elle va chercher la lumière partout. La photographie cherche la lumière même lorsqu’on croit ne plus en avoir la force, même lorsqu’on ne voit que l’ombre. Elle surprend par sa capacité à capter la lumière. Elle est la preuve que même dans la nuit réside une part de lumière. La photographie est pour moi une fois de plus comme l’écriture, les mots, la littérature, la poésie: une possibilité de se tourner vers la lumière n’importe quand, n’importe où. C’est cette recherche de lumière envers et contre tout que je lis dans le merveilleux recueil de poèmes intitulé Dibaxu.
Cette photo, qui fait pour moi écho à la photo, a été prise dans des conditions minimales: avec un appareil en plastique, utilisé en lomographie, de très mauvaise qualité, qui permet très peu de réglages, un soir de cet hiver, par un temps très couvert. Et pourtant, le film sensible a capté ce qu’il fallait de lumière pour fixer une image. Je l’ai redécouverte lors de son développement, après de de longs mois d’hibernation.
Evidemment, cette « métaphore » sur la lumière est très belle et nous invite à vivre l’ombre dans toute sa « luminosité » 😉
Merci pour ce beau partage!
Merci pour ce bel oxymore! J’adore « vivre l’ombre dans toute sa luminosité ». C’est rassurant de savoir que la lumière rentre aussi par les fissures, fentes, les fractures, les failles, même infimes.
Bonjour !
C’est sur que la lomographie se prête particulièrement à ce genre d’images car ce genre d’appareils photos nous restituent des images très « déformées » avec du fort vignettage et une netteté plus que médiocre. Tu le sais, j’adore !!!
Sinon, on dit que tant qu’on y voit quelque chose on peut photographier. Et ce sont souvent dans des conditions extrêmes que se révèlent des images vraiment intéressantes.
Merci pour ce partage !
Merci de ton passage! J’ai souvent une pensée pour toi quand je sors mon holga, et j’adore attendre la surprise de la découverte du résultat. C’est si différent de la vision instantanée qu’on obtient avec un numérique. Ca me fait parfois l’effet d’un lâcher prise. Je ne sais par exemple jamais exactement tout ce qui est entré dans le cadre, mais pas moyen de vérifier avant le développement. Et ça j’aime vraiment beaucoup, même si je suis parfois déçue.
Très belle photo, l’ambiance est excellente et fait penser à du Edgar Allan Poe, c’est limite inquiétant
Très honorée de ton passage et du lien avec Edgar Allan Poe, dont je ne connais que quelques poèmes et nouvelles. L’inquiétant que tu nommes est tout à fait là pour moi, sans être extrêmement menaçant. C’est un peu comme un témoignage, un reste, comme les « cendres » du poème de Juan Gelman (qui a vécu des choses atroces), mais qui illumine avec ses mots et par son engagement.
c’est une belle image, une ombre chinoise, un décor attendant sa marionnette, une scène en quête de son héros, un personnage, un pendu ? une jeune fille trop curieuse ? un esprit rêveur ? que sais-je.
Une belle encre photographique.
J’aime toutes ces évocations poétiques qui me semblent, malgré leur apparente opposition, se faire écho. En tout cas, c’est une scène avec évidence. Un espace en attente. Peut-être à la façon Beckett, mais là j’en fais trop! 😀 En tout cas, je retrouve dans tes mots tout l’art de tes triptyques!
Cette image ne peut laisser indifférent. C’est saisissant, elle nous plonge immédiatement dans une ambiance particulière, libre à chacun d’imaginer ..
Je suis très contente de provoquer les songes imaginaires des uns et des autres! 🙂