Blessure
LA BLESSURE
Seule issue
des maux qui ne trouvent pas de mots
des douleurs vives qui éclatent du
– trop –
de trop avoir ruminé
de trop avoir retenu
de trop avoir remué
du trop
qui a fini par enfler
aucune issue : seule la blessure
On se blesse d’avoir trop souffert
on se blesse d’avoir ensemble trop souffert
et de n’avoir pas su
de n’avoir pas pu
la faire cesser
cette souffrance
cette douleur
ni la sienne
ni celle de ceux qu’on aime
aucun répit: seule la blessure
Alors on l’entretient
on l’hérite
on la transmet
cette douleur latérale
cette souffrance viscérale
dégât collatéral
à défaut de –
à défaut d’arriver à la faire taire
on l’attise
au souffle
ou à l’huile
aucun solution: pas d’échappatoire
Il arrive qu’
on n’échappe pas à ses démons
ni à ceux des parents des grands-parents
surtout pas à ceux des gens qu’on aime
on la porte avec soi
après soi
devant soi
sur soi
la douleur
la sienne, la leur, la nôtre, la vôtre
jusqu’à ce qu’elle éclate
qu’elle éclabousse avec fureur
et que seul reste
le choix de panser la blessure
épilogue
Quand il arrive qu’
on n’échappe pas à ses démons
on y survit parfois
on surmonte
on remonte
et on cicatrise
finalement
Texte beau et juste, Jeanne.
Ne plus y toucher, ne pas réveiller, cicatriser à l’air libre – où un passage s’est ouvert.
Tes mots et tes images s’accordent parfaitement ! Ce qui m’étonne le plus, c’est d’éprouver du plaisir en lisant un texte sur la souffrance … Et je crois que c’est la magie unique des mots ! Bravo !
Je n’ai pas encore réussi à cicatriser. C’est long… c’est familial, c’est incompréhensible, je suis impuissante face à cela. C’est mon histoire qui se retrouve dans tes mots.
J’essaierai plus tard peut-etre de traduire le texte.
Bonne journee
Helmut
@Tania: Merci pour cette très belle phrase. Cet écho me plaît beaucoup!
@Laurence: Merci! Cette association entre photo et mots et la simple tentative de mettre certaines choses en mots me semblent être un essai, une sorte de sublimation d’une souffrance. C’est peut-être de là que naît la possibilité d’éprouver du plaisir à quelque chose de triste en tant que lecteur.
@Terre indienne: Peut-être qu’un jour les mots, les photos, les images, les peintures, le temps emporteront tout cela…
@Helmut Maier: Vous ne me croirez jamais, mais j’ai commencé à traduire un de vos poèmes (Wechsel-Bäder) un peu avant que vous passiez ici! La traduction doit être une forme de rencontre aussi :).
Bonjour Jeanne.
Ouf.. tout un coup que j’ai pris à lire ça. Lire ces mots, voir ces photos. c’est terrible.
Cicatriser? J’ai l’impression qu’il y a des blessures qui ne demandent qu’à se rouvrir. Difficile, mais beau ce post.
on n’échappe pas à ses démons.
Merci de prouver que sur internet on peut trouver des oasis d’intelligence. C’est rassurant.
Merci pour le compliment un peu trop élogieux… 🙂